Haute-Vienne : flambée des prix des matières premières, les professionnels du BTP sont inquiets
La tension s’accentue dans le secteur de l’artisanat et du BTP. L’envolée des prix des matériaux couplé au spectre d’une pénurie inquiètent les professionnels du Limousin. En cause, la crise sanitaire qui déstabilise le marché mondial.
Le marché des matières premières est particulièrement volatil. La Fédération des entreprises du BTP tire la sonnette d’alarme. Les prix des matières premières utilisées dans la construction ne cessent d’augmenter depuis plusieurs semaines. La désorganisation des marchés mondiaux en raison de la crise du coronavirus est en cause.
L’envolée des prix de certaines matières premières
+114,29% d’augmentation du prix du PVC entre juillet 2020 et février 2021, +106,67% pour l’acier sur la même période, +51,32% pour le cuivre, +26,91 pour l’aluminium, autant de matières premières utilisées dans la construction qui subissent une flambée des prix, selon une étude de CAE Groupe et le Centre d’Etudes de l’Economie du Bois. Les professionnels du secteur du bâtiment sont très inquiets par l’ampleur du phénomène.
Thierry Berrand, plombier-chauffagiste à Verneuil sur Vienne, en Haute-Vienne, explique : ‘’On subit de plein fouet des hausses de tous les matériaux que l’on utilise au quotidien, le PVC pour les vidanges, le cuivre pour l’adduction d’eau ou de gaz, l’acier pour le chauffage. Pour le moment, on ne répercute pas les hausses, mais nous allons être obligé de remettre nos tarifs à jour. On le voit bien sur nos bons de livraisons, le prix n’est plus ce qu’il était il y a 15 jours, 3 semaines. Sur le cuivre, par exemple, ces 3 dernières semaines, il a augmenté de 10 %, nos marges diminuent ». Ces hausses incessantes déstabilisent le marché.
DES MARGES EN BERNE, DES HAUSSES RÉPERCUTÉES
Benjamin Chimol, secrétaire général de la CAPEB en Haute Vienne explique que les artisans ont en général un an d’avance en stock de matériel et ne pratiquent pas des marges extrêmement fortes.
Avec l’augmentation du prix des matériaux, la problématique est que les travaux qu’ils vont facturer aujourd’hui correspondent à la réalité de leur marché d’il y a un an. Donc, désormais, quand ils vont sur les chantiers, certains arrivent même à travailler presque gratis puisque leur marge est absorbée par l’augmentation du prix des matériaux. Cela fragilise les entreprises, car très peu vont vouloir répercuter la hausse parce que les clients n’ont pas des finances extensibles. Par ailleurs, il y a un obstacle juridique avec les conditions générales de vente que l’on ne peut pas modifier au bon vouloir quelques mois après
Benjamin Chimol, secrétaire général de la CAPEB en Haute-Vienne
LA DOUBLE PUNITION : HAUSSE ET PÉNURIE
Concernant l’acier notamment, les hauts fourneaux en Europe ont, soit été stoppés pendant les périodes de confinement, soit ont réduit fortement leur activité.
« La sidérurgie a arrêté de stocker et aujourd’hui il n’y a plus que l’Asie qui a relancé sa production. Les Etats-Unis ont repris le commerce de la sidérurgie avec la Chine, c’est donc très difficile pour les industriels et distributeurs européens de trouver de l’acier en quantité suffisante » ajoute Benjamin Chimol.
Mécaniquement, cela fait augmenter les prix.
La difficulté des artisans est d’assumer ce coût supplémentaire non pris en charge par les négociants. Ils sont obligés de payer la note sans répercuter la hausse car les contrats sont signés avec les clients. La situation serait encore pire pour les maisons individuelles.
TENSION SUR L’APPROVISIONNEMENT EN MATIÈRES PREMIÈRES
Les difficultés d’approvisionnement sont généralisées, selon les professionnels de ce secteur, pour l’acier, le zinc, le cuivre et le plastique.
A cela, s’ajoute des hausses de tarifs importantes. Le polystyrène a la plus forte augmentation, + 20 à 26 % selon les fournisseurs.
Ce matériau n’est pas très onéreux mais la hausse est conséquente lorsqu’il s’agit de réaliser l’isolation par l’extérieur. Les professionnels craignent que ces hausses ne soient pas provisoires.
[… On n’est pas tombé de la dernière pluie, donc les prix ne rebaisseront pas au niveau précédent d’avant crise. C’est comme la Covid, on sait quand ça commence, mais on ne sait pas quand cela va s’arrêter. Même les maîtres d’œuvre sont inquiets ».]
LES MARCHÉS PUBLICS ÉGALEMENT EN QUESTION
L’affaire est sensible concernant les marchés publics. Les organisations professionnelles ont un rôle de sensibilisation à jouer, selon le sécrétaire général de la CAPEB Haute-Vienne, car certaines entreprises peuvent recevoir des pénalités de retard dues à la pénurie des matériaux. « Une véritable injustice car elles n’y sont pour rien » explique Benjamin Chimol.
Le risque, c’est peut-être que les collectivités pénalisent les entreprises alors que la pénurie est mondiale.
Tous les secteurs sont touchés, du bâtiment à l’automobile, de l’agroalimentaire à la santé.
Bruno Lemaire, ministre de l’Economie, a été interpellé par les professionnels du bâtiment notamment dès le mois de février. Tous attendent des mesures concrètes pour endiguer le phénomène.
Source : France3 région Nouvelle Aquitaine